lundi 8 septembre 2014

En ce lieu enchanté de Rene Denfeld

207 pages
21 août 2014
Fleuve Éditions


La dame n'a pas encore perdu le son de la liberté. Quand elle rit, on entend le vent dans les arbres et l'eau qui éclabousse le trottoir. On se souvient de la douce caresse de la pluie sur le visage et du rire qui éclate en plein air, de toutes ces choses que dans ce donjon, nous ne pouvons jamais ressentir.

Dans le couloir de la mort, enfoui dans les entrailles de la prison, le temps passe lentement. Coupés du monde, privés de lumière, de chaleur, de contact humain, les condamnés attendent que vienne leur heure.
Le narrateur y croupit depuis longtemps. Il ne parle pas, n'a jamais parlé, mais il observe ce monde "enchanté" et toutes les âmes qui le peuplent : le prêtre déchu qui porte sa croix en s'occupant des prisonniers, le garçon aux cheveux blancs, seul, une proie facile. Et surtout la dame, qui arrive comme un rayon de soleil, investie d'une mission : sauver l'un d'entre eux. Fouiller les dossiers, retrouver un détail négligé, renverser un jugement. À travers elle naissent une bribe d'espoir, un souffle d'humanité. Mais celui à qui elle pourrait redonner la vie n'en veut pas. Il a choisi de mourir.
La rédemption peut-elle exister dans ce lieu où règnent violence et haine ? L'amour, la beauté éclore au milieu des débris ?


Je ressors bouleversée par cette histoire, par cette narration de la vie en prison, par cette vision bien à part d'un monde inconnu ou mal connu. Je suis restée en haleine, sur le qui-vive, du début à la fin. Je n'ai pas pu lire ce livre d'une traite, bien malheureusement, alors que je n'avais vraiment pas envie de le lâcher. Les histoires de détenus n'avaient pas encore croisé mon chemin jusqu'à En ce lieu enchanté. Comme je l'avais lu auparavant, le narrateur décline ce monde en rêve, en poésie. Il parle des douleurs des personnes qu'il côtoie avec humilité, et c'est réellement ce qui m'a attendrie et engloutie dans cet univers.

Notre homme, condamné à mort, raconte la vie de détenus, d'un prêtre déchu, d'une dame cherchant toutes les preuves pouvant sauver les incarcérés de la peine de mort proche, et ne s'épanche pas sur son passé. Il est malheureux car il ne se souvient pas de grand-chose le concernant, surtout comment il en est venu à ne plus pouvoir parler. C'est arrivé comme ça, un jour. Personne au pénitencier n'a entendu un son sortir de sa bouche. Il est juste connu pour aimer la lecture, et tout particulièrement "L'Aube blanche". C'est la seule chose qui le rattache à la vie.

Ce roman est un coup de cœur pour ma part. Je me souviendrai longtemps de ces personnages pesants, de cette vérité énoncée, et du dénouement qui m'a tiré les larmes des yeux.

C'est un beau et dur roman que je conseille vivement.

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