mardi 29 décembre 2015

Creepy Christmas, rêves et cauchemars de Noël, anthologie, divers auteurs

218 pages
23 février 2015
Editions Otherlands


Treize auteurs vous présentent Noël tel qu'ils l'imaginent...



Le bon vieux bonhomme, tout de rouge vêtu, est toujours présent, accompagné de dizaines de paquets cadeaux...


Mais êtes-vous sûrs d'avoir été bien sages tout au long de l'année écoulée ? Méritez-vous vraiment les surprises qu'il vous réserve ? 

Après avoir lu ces quatorze nouvelles inédites, je ne suis pas certain que vous voudrez encore recevoir sa visite le 24 décembre prochain...



Je n'ai pas l'habitude de lire des histoires aussi macabres ! Mais quelle belle idée d'avoir tenté. Ici nous retrouvons treize histoires autour de Noël et nous entrons dans l'esprit morbide de chaque auteur pour en retirer... des choses pas très catholiques...


* Un cadeau démoniaque de Ruwan Aerts
Une excellente entrée en matière. Cette nouvelle m'a d'emblée fait penser à Hate List que j'ai lu cette année. Yohan, ado persécuté, décide de se venger de ses camarades et des professeurs. Mais une étrange voix se met à l'inciter dans ses choix... Cruel et vision plutôt horrible du monde proposé ici...

* Festin de Noël de François Cédelle
L'histoire était si inattendue que j'ai dû la lire deux fois et me rendre compte que j'avais mal compris la première fois. Du coup, la diablerie prend tout son sens. Un père et ses enfants peinent à trouver de quoi manger en ces temps... Jusqu'au festin. C'est bien trouvé, et bien écrit. Je ne pense pas avoir été la seule à l'avoir lu deux fois. Et généralement c'est bon signe.

* Xmas Park de Kate Dau
Cette nouvelle fait son effet, surtout pour les "fans" de clowns. Je n'ai pas eu peur car cela n'a pas de répercussion sur moi, mais je salue les descriptions et l'ambiance très bien amenée. On voit 2 couples évoluer dans un parc d'attractions désaffecté, leur idée pour fêter Noël. Sanglant et bien écrit. Bon petit final.

* Walter aime la neige ! de Patrick Godard
J'ai adoré cette histoire, c'est bien l'une de mes préférées ici. La plume de Patrick est douce et ciselée à la fois. On approche la douceur avec Walter et on sent la gnaque d'Ours. Du début à la fin, j'ai plongé dans ce petit bout de vie de Walter, ce personnage d'une tristesse...

* Renaissance de Maritza Jaillet
Cette nouvelle m'a fait froid dans le dos. C'est personnel car je faisais des rêves de ce style, en tout cas pour ce qui est de l'idée de départ... Le final, c'est autre chose ! Triste et sanglante histoire, la petite Rachel se retrouve face à quelque chose de démentiel. Très réussi.

* La visite de Sylvain Lamur
J'ai beaucoup aimé cette histoire. Elle est très étoffée, montre par quels sentiments passent les hommes, et le tout est écrit d'une façon accessible, fluide.
Quelques Sans Domicile Fixe se rassemblent pour la veillée de Noël et décident de se raconter des histoires... jusqu'à l'arrivée de Bonhomme John. Une des nouvelles les moins gore du recueil, mais c'est sûrement ce qui m'a plu. Tout dans la finesse.

* Le grand cru de Péléane Léana
J'ai dû relire cette nouvelle plusieurs fois car j'ai eu l'impression de ne pas tout comprendre ou de passer à côté de certaines choses, certains indices me permettant de comprendre l'histoire entière. Du coup, cela doit être avec cette nouvelle que j'ai eu le plus de mal à me transposer dans l'histoire. Elle est toutefois très travaillée, et je sais que je ne serai pas la seule à repartir en arrière, en avant à plusieurs reprises. L'auteure a bien réussi son coup ! L'histoire est tordue, très drôle, et bien saignante. Bel exercice ici ! Texte très réussi. Même s'il ne fait pas partie de mes préférés, je tire mon chapeau à Péléane.
Quant à une phrase pour résumer, ici je ne le ferai pas, je préfère ne rien révéler du tout pour que la surprise soit totale. Cela fera plus grand effet.

* Santa vs Ded Moroz : un conte de Noël de Loïc Lendemaine
J'ai beaucoup aimé la dérision de cette histoire, tout comme la fin. Ici on assiste à une lutte sans merci entre le père Noël et le père bienfaiteur russe. Il y a une belle imagination et cela m'a donné envie de connaître l'histoire de Ded Moroz. Merci à Loïc !

* Le banquet de Yule de Frédéric Livyns
Récit très efficace, sans fioriture. Un homme doit ramener les effets qu'il a cambriolés dans un village à un certain Jules, mais sa raison est malmenée par sa cupidité. C'est bien écrit. J'ai beaucoup aimé.

* Mely Klismas d'Emmanuel Delporte
J'ai trouvé ce récit jubilatoire. Et pourtant, le début ne me convainquait pas, surtout à cause du langage employé. Mais je savais très bien que ça se devait d'être comme cela, au vu du personnage principal. Passée outre ce détail, le fait que le texte dure plus de 30 pages est un pur régal car on a le temps de s'imprégner de tout. On assiste au récit dément d'un homme ayant enfreint des règles embringué dans une histoire incroyable où il devra faire son possible pour survivre. Gros gros coup de cœur. Et pourtant, c'est cruel de détails gore. Pas forcément facile à "avaler" quand on n'a pas l'habitude !

* Christmas Pudding de Marielle Ranzini Marquet
Le ton donné par le narrateur m'a un peu dérangée ici. Cela montre un côté détaché et un peu sarcastique, et j'ai eu du mal à apprécier. Hormis ceci, l'histoire est excellente et sanglante à souhait ! J'ai totalement adhéré à l'environnement que j'ai projeté dans le manoir de la série Charmed sans le vouloir. La cave y était parfaite ! Encore un récit cruel, sanglant et jouissif.

* Menu de Noël pour petites filles mortes de Dean Venetza
Encore une nouvelle pleine d'imagination. Notre narrateur, un horloger, gère les portes du Temps. Une petite Zia s'amuse à les passer, pour un jour chercher à punir le père Noël, car c'est un homme mauvais, et veut venger deux petites filles zombies de sa cruauté. J'ai trouvé les idées excellentes. Une autre histoire que j'ai beaucoup aimée.

* La bonne étoile de Béatrice Ruffié Lacas
La dernière nouvelle du recueil ne manque pas de cruauté ! Une maman a cherché un homme bien pour... elle ? sa fille ? autre chose ? L'histoire nous est dévoilée alors qu'elle et sa fille installent et décorent le sapin de Noël. Ici, il n'y a rien de sanglant, c'est un peu à part du recueil tout de même, mais le fond reste le même : la mort, le sang, la manipulation.

En résumé, j'ai passé d'excellentes heures grâce à tous ces petits bouts d'horreur. Certaines nouvelles se sont détachées des autres, mais cela est au goût de chacun. J'ai été ravie de voir la qualité des textes, même si l'on retrouve beaucoup de fautes de français. La maison d'édition n'ayant pas de correcteur attitré, il n'est pas évident pour les auteurs de réussir un sans-faute. Alors l'indulgence et l'abstraction doivent être de rigueur ici. J'ai donc jugé les treize histoires dans leurs fondements, leurs cohérences, leurs chutes, et j'avoue que le tout est un excellent travail. Au-delà de mes espérances. Bravo à tous.

lundi 28 décembre 2015

La fractale des raviolis de Pierre Raufast

240 pages
27 août 2015
Editions Folio


Il était une fois une épouse bien décidée à empoisonner son mari volage avec des raviolis. Mais, alors que s’approche l’instant fatal, un souvenir interrompt le cours de l’action. Une nouvelle intrigue commence aussitôt et il en sera ainsi tout au long de ces récits gigognes.


Tout ébaubi de voir tant de pays, on découvre les aventures extraordinaires d’un jeune garçon solitaire qui, parce qu’il voyait les infrarouges, fut recruté par le gouvernement ; les inventions stratégiques d’un gardien de moutons capable de gagner la guerre d’Irak ; les canailleries d’un détrousseur pendant l’épidémie de la peste à Marseille en 1720 ou encore la méthode mise au point par un adolescent sociopathe pour exterminer le fléau des rats-taupes.

Véritable pochette surprise, ce premier roman ajoute à la géométrie rigoureusement scientifique, la collision jubilatoire du probable et de l’improbable.



La fractale des raviolis est une lecture atypique, une histoire en plusieurs temps. Tout d'abord, le décor se pose, puis les faits se dévoilent chapitre par chapitre, en un fil conducteur, pour se caler là où le couple nous avait laissé au tout début. Et nous offrir le dénouement que l'on attendait.

Pour moi, c'est un pari osé et un pari gagné. Il fallait se lancer dans un tel exercice sans craindre de ne pas retomber correctement sur ses pieds. J'ai aimé l'ensemble de l'histoire ainsi que toutes les petites tout le long.

Une femme veut empoisonner son mari pour l'avoir trompée. Mais un fait vient tout faire rater. Et lui rappeler son père, qui nous amènera au don de Sheridan, pour apporter un sens nouveau à l'histoire.

Cette histoire sur Paul Sheridan est absolument folle, j'ai beaucoup aimé, et je n'ai pas lâché l'histoire grâce à l'évolution de l'affaire. Certes, on peut se dire que l'ensemble est parfois un peu tiré par les cheveux, mais on pardonnera rapidement ce sentiment car la satisfaction reprend vite le dessus.

Je n'en dis pas plus, je vous laisse découvrir ce roman comme un moment de légèreté !

Merci aux Editions Folio de m'avoir fait découvrir ce livre.


lundi 14 décembre 2015

Petit éloge de la lecture de Pef

144 pages
3 septembre 2015
Editions Folio


Peut-on voyager à dos de baleine?

Quel est le meilleur remède contre l’insomnie : la lecture parcours ou la lecture par cœur? Est-il possible qu’un rossignol de trois mètres de long offre un peu de lecture à notre oreille? Que retenir de notre passage dans une «biblioville»? Et que vient faire L’Homme au casque d’or de Rembrandt dans ce Petit éloge de la lecture ?

De nos pieds jusqu’au ciel étoilé, tout est lecture… Pef nous entraîne dans un voyage sans autre destination que celle du plaisir de lire. 



Ayant lu juste avant Petit éloge du petit déjeuner avec un vrai plaisir, quoi de mieux que de réitérer avec un autre éloge sur un sujet que j'adore : la lecture ! Bien mal m'en a pris.

Pef, grand manipulateur de mots, a une approche très personnelle sur le sujet. Peut-être trop, car je n'ai pas réussi à m'infiltrer dans ses réflexions, dans ses anecdotes qui composent cet ouvrage. Il est très difficile de s'impliquer dans cet écrit, et pourtant j'ai essayé de lire certaines pages plusieurs fois. Mon sentiment est resté le même. Quelques passages pourront plaire, mais je trouve l'ensemble sans grand intérêt. On essaie de s'accrocher à quelque chose tout le long, mais sans réel succès.

Alors, certains me diront que je suis mauvaise langue, mais j'avoue que je m'attendais à plus de "mordant", quelque chose qui suscite mon intérêt de grande lectrice. Pourtant, habituellement, j'adore lire des anecdotes. Ici, je n'ai rien trouvé à quoi me raccrocher, je ne me suis pas identifiée à ce que Pef pouvait nous raconter, et j'ai fini par décrocher.  

Je suis vraiment passée à côté de cette lecture. C'est bien dommage car généralement j'aime ce que Pef écrit. Je pense avoir comparé avec le livre de Thierry Bourcy qui, lui, donnait envie de tourner les pages. La recherche était là, c'était une étude intéressante parsemée d'anecdotes.

Je remercie toutefois les Editions Folio de m'avoir fait découvrir cette lecture.


Petit éloge du petit déjeuner de Thierry Bourcy

128 pages
3 septembre 2015
Editions Folio


Prendre ensemble le petit déjeuner, c’est forcément partager bien plus qu’un repas : il y flotte des restes de rêves, des lambeaux de sommeil, la nostalgie des draps ou de la chaleur de la couette ; le corps encore engourdi enchaîne les gestes automatiques, le visage n’a pas eu le temps de reprendre le masque du travail, un soupçon de maladresse fait s’entrechoquer les tasses et les couverts, et le regard se perd sur le nuage de lait qui s’épanouit dans le mug de thé. On ne partage pas le petit déjeuner avec n’importe qui.


Ce livre est une petite douceur agréable et parfois drôle sur l'impact du petit déjeuner sur nous les humains, à travers les âges et les pays. Le mot "éloge" prend tout son sens ici.

L'auteur décortique toutes les manies, les essais, les réussites et les capotages du repas le plus important de la journée avec une pointe d'humour et d'ironie qui donne envie d'avancer dans notre lecture. Il nous livre une étude très élaborée sur le sujet, le compare souvent à des films que la plupart d'entre nous connaît.

Du début à la fin, j'ai eu l'eau à la bouche. Ce petit livre est très intéressant et je trouve qu'il donne l'envie de savourer le repas que beaucoup de français sautent chaque jour, de prendre son temps le matin et de tartiner son pain de confiture bien fruitée.


Même si cet éloge n'a rien d'innovant, Thierry Bourcy a très bien ciblé notre intéressement. J'ai passé un très bon moment de lecture. Je remercie d'ailleurs beaucoup les Editions Folio de m'avoir offert la possibilité de lire ce livre. 



dimanche 6 décembre 2015

Malicia Peps, Concours à Canal sorcière de Sibéal Pounder

253 pages
23 septembre 2015
Editions Milan


Quand Fran, la Fabuleuse Fée fait irruption dans sa vie, la petite Malicia Peps a du mal à y croire ! En quelques heures, elle apprend : qu'elle est une sorcière, qu'elle est convoquée de toute urgence pour rejoindre ses semblables au royaume de Goutteterre, qu'elle doit participer à un grand jeu retransmis sur canal sorcière. Pour pouvoir rester vivre dans ce monde merveilleux, Malicia n'a qu'une solution : elle doit gagner la guerre des sorcières. Mais l'affrontement s'annonce redoutable.


Déjà, rien qu'à regarder, ce livre donne envie de le dévorer ! La couverture est très belle et rigolote, elle donne envie à la maman de retomber en enfance et à l'enfant de se plonger de suite dedans. Je ne m'attendais pas à si bel objet.
Puis, l'histoire est toute mimi, drôle, inventive, les personnages sont attachants, et je trouve que le vocabulaire correspond tout à fait à l'âge ciblé. Malicia Peps arrive dans un monde qu'elle n'aurait jamais cru possible, elle se découvre sorcière, et pour couronner le tout : elle doit participer à un jeu particulier retransmis à la télé dans ce monde qu'elle pense irréel. Chaque sorcière est liée à une fée pour réussir à gagner. Et ce qui va intriguer Malicia par-dessus tout, c'est qu'elle a été désignée par quelqu'un sachant qu'elle était une sorcière pour participer à ce jeu ! Qui la connaît aussi bien ? Comment cette personne savait qu'elle était une sorcière alors qu'elle même ne le savait pas ? Voilà un petit bout d'intrigue qui donne envie d'aller plus loin dans l'histoire, en plus des petites descriptions aussi savoureuses les unes que les autres sur la vie au royaume de Goutteterre.
Pour finir, je ne saurais que conseiller ce beau petit roman fantastique à votre enfant, dès l'âge de 9 ans. Cela va le ravir et lui donner envie de lire la suite, voire d'autres romans de ce genre...

Je remercie fortement Babelio et les Editions Milan qui m'ont gâtée avec Malicia Peps, Concours à Canal Sorcière. Il va aller entre les mains de ma fille de 9 ans maintenant, et je sais déjà ce qu'elle va en penser !


lundi 19 octobre 2015

L'école d'antan en 300 images de Daniel Durandet

191 pages
19 septembre 2014
Editions Charles Massin


Rappelez-vous des bons points, de l’odeur de l’encre et des tables en bois, le bruit des craies sur le tableau noir de la salle de classe, des mauvais tours et des punitions, de la chasse aux doryphores pendant la guerre, des billes dans la cour de récréation, de la remise des prix... L’École d’antan en 300 images présente toute l’histoire des écoles primaires de la Révolution française aux années soixante. Une plongée passionnante dans l’école d’autrefois: vie scolaire, vêtements, salles de classe, attitude des maîtres, apprentissage des disciplines, règles de morale…


Je fais partie de la génération des années 80-90 et je trouvais important de connaître l'école de mes ancêtres. J'avais bien écouté leurs histoires, ils m'avaient montré des documents de leur enfance, mais tout revoir dans cet ouvrage m'a procuré de longs moments de nostalgie. C'est donc avec des yeux curieux et avides de voir, de connaître, de comprendre et de comparer que j'ai tourné les pages.

Ce livre aborde cette institution bien avant l'époque de Charlemagne. On nous parle des écoles gauloises en 57-58 avant J.-C., c'est quand même quelque chose ! Je n'ai pas de souvenir d'avoir appris cela au collège. Et l'évolution au fil des pages est assez surprenante même si elle devenait importante et évidente, avec les changements qui s'opéraient tout autour.

On y trouve aussi des chapitres sur les instituteurs, sur les élèves, pour ne citer qu'eux. Ce n'est pas uniquement répertorié par date, ni par siècle. Tout y est répertorié : les méthodes d'écriture et de lecture, les salles de classe, l'instruction civique, l'utilisation de la cour de récréation, le calcul/l'arithmétique, les règles de morale, la fameuse "leçon de choses" dont j'ai très souvent entendu parler... Rien que de lire ce chapitre-là m'a confortée dans mon avis sur cet ouvrage. Avec la photo d'un certificat d'études primaires. Tout ce condensé m'a ramenée à ma propre enfance où ma grand-mère, parfois ma mère, me racontait toutes ces choses qui ne sont pas très significatives quand on est petit.

Ce livre est de toute beauté. Pour moi c'est une petite pépite. Ce n'est pas que 300 images que l'on retrouve, c'est vraiment toute l'histoire d'une institution. Photos d'époque, dessins, textes et anecdotes ornent les 191 pages. Quel travail et quelle recherche !

Je remercie fortement Babelio et les Editions Massin de m'avoir permis de découvrir ce livre. Je vais le garder précieusement. Et je le conseille à tout le monde, en tout cas tous ceux qui sont curieux de connaître l'école sur plusieurs siècles.

mardi 13 octobre 2015

Journal d'un cancre de Paul Beaupère

288 pages
11 septembre 2015
Fleurus


Guillaume Planchet est un élève catastophique : le jour de sa rentrée en 6è 4 au collège Marcel Tassombier, le carnet de correspondance se remplit de mots de professeurs indignés; le deuxième jour, une démonstration de tir à l'arc en cours de français récolte une pelletée d'heures de colle; en dessin, une fresque réalisée par projections de petits-suisses s'annonce fatale le troisième jour, et la venue prochaine de monsieur l'inspecteur promet d'être périlleuse...


De mauvaises notes en punitions, suivez le parcours scolaire hors norme d'un élève qui sort du rang et rêve pourtant d'y entrer. Pour ce faire, vous pourrez lire ses devoirs les plus mauvais, jeter un oeil à son carnet de correspondance très très rempli, et contempler ses bulletins trimestriels calamiteux.



Quelle bouffée d'air frais, de jeunesse ! C'est un roman qui se lit vite et qui m'a beaucoup fait rire ou sourire. Les situations sont bien cocasses et notre petit Guillaume n'en rate pas une, même si souvent c'est un manque de chance. On pourrait presque dire que c'est un cancre malgré lui !

Ce livre nous fait retourner dans notre jeunesse, on rit des mauvaises blagues, on compatit, on s'imagine parmi tous ces élèves... C'est très bien écrit, on s'y croirait !

Guillaume nous raconte ses journées, ses exploits, et la fin de chaque chapitre est ponctuée des commentaires des professeurs et proviseur sur le carnet de correspondance sur ce qui a pu se passer... ainsi que les réponses, un peu honteuses de leur part selon moi, des parents qui n'ont de cesse de défendre leur fils !

Je le recommande pour passer un moment de légèreté, d'amusement et de retour en enfance pour les adultes ! Et il sera très drôle pour les enfants !

A partir de 9 ans.


mercredi 7 octobre 2015

Né un 16 avril de Virginie Salvé

212 pages
16 mai 2012
Books on Demand


Lucas ne naît pas sous les meilleurs hospices. Rapidement ses parents, que tout oppose, se découvrent une passion commune : se ruiner la vie mutuellement. Au milieu de tout ça, Lucas tente avec son frère Charly de se construire et de susciter leur attention, mais rien y fait.

Des rencontres peu fortuites dont il se serait bien dispensé lui attirent les pires ennuis. Mais Lucas dispose d'une arme redoutable : sa détermination. Il n'a qu'un seul objectif en tête. 
Le chemin sera long et parsemé d'embûches avant d'accéder à des jours meilleurs et en savourer toute la splendeur.



Je pense que n'importe quel lecteur peut facilement s'identifier à cette histoire à un moment ou à un autre.

Lucas n'est pas gâté par la vie. Il n'a pas le meilleur des héritages... Ses parents ne sont pas aimants, que ce soit l'un envers l'autre ou tous les deux envers leur fils. Il doit cheminer seul sans aucun soutien, il apprend à se dépêtrer des situations difficiles seul ou grâce à sa compagne Julia, après avoir rencontré Sandrine et fait de mauvais choix. Mais comme on le dit, la roue tourne. Le malheur et la malchance finiront bien par s'en aller un jour...

Virginie Salvé peint ici une vie semée d'embûches, un homme blessé par l'amour sous toutes ses formes, mais qui doit se reprendre en mains pour ne pas sombrer et finir comme son père. Le ton est doux, sarcastique, bien amené. Cela rend les personnages réels, sensibles, attachants pour certains.

Il m'a été facile de me mettre dans la peau de Julia, d'espoirs en désillusions... Mais la vie donne des leçons, et il faut saisir les opportunités quand elles s'offrent à nous. Pardonner aussi devient très important pour avancer. Et c'est ce que ce livre nous démontre.

Beau premier roman ! Je lirai avec plaisir les suivants ! 


vendredi 25 septembre 2015

Memories of Retrocity de Bastien Lecouffe Deharme

120 pages
15 mars 2011
Editions du Riez


A la veille de l'hiver 2004, William Drum, ex-inspecteur de la police criminelle de Chicago, est exilé par ses supérieurs à Retrocity. Retrocity, la Cite déchue, fermée sur elle-même, que l'on tente de faire disparaitre des consciences depuis plus d'un demi-siècle.

A l'aide d'une machine à écrire trouvée dans son appartement, William se lance dans la rédaction de son journal de bord, et s'enfonce dans la ville.
Une ville hors du temps, que les citoyens ont depuis longtemps désertée. 
Une ville où la mécanique remplace les organes humains.
Une ville malade et rongée par un étrange virus.
Une ville de laquelle on ne revient pas. 



Ce livre sous forme de bande dessinée m'avait fait de l'œil il y a quelques années, à sa sortie. Et aujourd'hui elle m'a été recommandée dans le cadre de lectures du genre steampunk que je souhaitais découvrir.

Cette histoire, ces dessins appartiennent à un genre surréaliste, de la science-fiction déjantée, et au fur et à mesure que j'ai avancé, je me suis souvenu d'un film que j'avais drôlement apprécié et qui me le rappelait d'une certaine façon : Dark City d'Alex Proyas.

Toute personne à l'aise dans les domaines surnaturel/anticipation/étrange/lynchéen se réjouira de cette incursion dans la vie de l'ex-flic William Drum exilé à Retrocity. Il n'est pas bon de dévoiler l'histoire car elle est très courte, s'apparentant à la forme d'une BD. Il vaut mieux que chacun l'apprécie à sa valeur, car elle est courte mais intense.

L'univers dans lequel nous plongeons est glauque à souhait, décalé, les graphismes sont magnifiques et illustrent très bien les textes. C'est une très belle découverte et je conseille fortement ce livre.





mercredi 16 septembre 2015

Le doute de S.K. Tremayne

380 pages
2 septembre 2015
Presses de la Cité



Un an après le décès accidentel de Lydia, l'une de leurs filles jumelles, Angus et Sarah Moorcroft décident de tout recommencer en changeant d'environnement. Ils rejoignent alors une petite île écossaise qu'ils ont héritée de la grand-mère d'Angus. 
Mais l'emménagement ne se passe pas aussi bien que prévu ; Kirstie, leur fille survivante, se met à affirmer qu'elle est en réalité Lydia. Alors qu'un brouillard glacial enveloppe l'île, l'angoisse va grandissant…

Que s'est-il vraiment passé en ce jour fatidique où l'une des deux sœurs a trouvé la mort ? 



Après avoir refermé le livre, j'ai eu l'impression d'avoir "bâclé" ma lecture au moment du dénouement tellement je voulais savoir, comprendre. Je suis restée sur ma faim en quelque sorte. Je ne m'attendais pas à ce genre de fin, plus à quelque chose de plus fantastique, limite irréel tellement on frôle le paranormal dans ce livre. De ce fait, je ne sais qu'en penser. Je suis assez dubitative... Ce mélange de prénoms avant l'épilogue m'a finalement larguée, comme si j'avais eu l'impression que le narrateur se perdait en même temps qu'il cherchait à semer le trouble en nous. C'est sûrement ce sentiment qui m'a laissé un goût amer en le terminant.

Dès le début, la couleur est annoncée : non seulement nous doutons de l'identité de cette enfant, mais la mère nous en fait part très rapidement, et se refuse à admettre qu'il aurait pu y avoir une confusion entre ses jumelles. Est-ce Kirstie qui est tombée du balcon ou Lydia ? Et sans cesse ce doute sera dans notre tête. Tout est là pour nous embrouiller : les confidences du père, Angus, ses réelles pensées que l'on peut interpréter comme bon nous semble, les faits qui sont apportés par l'enfant vivant, les mensonges qu'ont croiraient vrais, les révélations de la mère, Sarah. Bref, c'est le style typique du thriller qui va vous entraîner au dénouement sans que vous ayez eu le temps de voir les heures passer, ou qui vous a poussé à faire nuit blanche car "il fallait que vous sachiez pour pouvoir dormir en paix !"

Hormis la fin, j'ai beaucoup aimé ce livre, vraiment. Tout a imprégné mon esprit, et c'est vraiment par manque de temps que je n'ai pas pu le lire aussi rapidement que je l'aurais voulu. C'est angoissant, et quand on pense que cela va se calmer un peu, la petite demoiselle (Lydia ou Kirstie) va revenir à l'assaut avec quelque chose qui marquera le père, la mère, le récit, le lecteur.

Honnêtement, ce roman vaut le détour. Déjà que sa couverture est déstabilisante de sobriété, de beauté et d'angoisse (je ne sais pas pourquoi mais cela m'a de suite fait penser aux vieux films d'horreur de Dario Argento ou John Carpenter...), le reste de l'œuvre tient, à mon sens, bien ses promesses !

mercredi 26 août 2015

En rage de toi d'Adeline Dias

188 pages
10 septembre 2012
Editions Valentina


Dans une rue proche de la Grande Place de Lille, un nouveau café vient d’ouvrir ses portes : le Marylin. Son gérant, Josselin, espère pouvoir y refaire sa vie tranquillement, essayant de mettre de côté un passé douloureux.
​Mais c’est sans compter sur un petit geste du destin. Elle est belle, brune et surtout pressée. Lui, il a juste eu le malheur de la bousculer dans la rue.
C’est leur première rencontre, mais pas la dernière… Juliette vient d’entrer dans la vie de Josselin.
​Ils ne le savent pas encore mais cette rencontre va bouleverser leur vie.



Je ne lis pas souvent de la romance car ce n'est pas du tout mon style, mais je me souviens quand ce livre est sorti : la couverture avait fait son effet ! Je l'avais trouvée magnifique, tellement douce et romantique... C'est le reflet du roman en lui-même. Les relations humaines - amicales ou amoureuses -  sont le fil conducteur de cette histoire.

Il ne faut jamais s'arrêter aux apparences, aux préjugés, et c'est principalement ce qu'Adeline Dias développe ici. Ces deux personnages principaux, Josselin et Juliette, ne réussissent pas à s'apprivoiser dès leur première rencontre. Au contraire ! Ils se haïssent bien avant de s'aimer. Les relations humaines peuvent être tumultueuses et ils se laissent tous les deux envahir par leurs sentiments. Mais les opposés s'attirent... Il va de soi que ces deux jeunes deviendront fous amoureux l'un de l'autre, mais découvrir le parcours jusqu'à ce moment est une histoire à savourer...

Adeline Dias m'a bien montré qu'elle avait un grand esprit d'analyse. Ses personnages ont du caractère, mais un caractère bien travaillé, et non survolé. Elle a su créer un environnement tout à fait réaliste, des mises en scènes simples de la vie quotidienne donnant de l'importance à la trame du récit.

J'avoue que Juliette est particulièrement ce que je nommerais "tête à claques" et Josselin est un peu trop taquin à mon goût. Mais je ne suis pas étonnée que ces deux personnes-là finissent par s'entendre aussi bien. Le titre "En rage de toi" sied parfaitement à toute l'histoire.

En bref, une très belle romance sans mièvrerie et qui plaira à plus d'une !


lundi 24 août 2015

Nostalgie, quand tu nous tues de Rodolphe Fontaine

230 pages
1er mai 2012
Les 2 encres


Lorsqu’un corps sans vie est retrouvé à Rouen, au pied du pont Flaubert, le commandant de police Marius Korda est persuadé d’une chose : il a déjà croisé la victime lorsqu’il était en compagnie de son meilleur ami, Hippolyte Delyon. Alors que l’enquête n’en est qu’à ses balbutiements, un nouveau meurtre est commis et les deux amis se rendent compte que le passé des victimes est lié au leur.

Peu à l’aise dans cette affaire, Marius n’hésite pas à mandater Hippolyte pour mener des investigations non officielles. Mais le résultat de ces dernières pose un véritable problème : celui par qui les crimes sont perpétrés semble être la première victime de cette série de meurtres…


Je suis agréablement surprise par la fluidité du texte. La narration est très bien construite, Les personnages sont suffisamment creusés pour qu'ils apportent de l'intérêt à l'intrigue. En ce qui me concerne, j'aime tout particulièrement les romans qui ne font pas 300-400 pages, j'ai tendance à me perdre dedans et je finis tôt ou tard par survoler des passages de descriptions. Avec Nostalgie, quand tu nous tues, je n'ai pas eu ce problème. L'intérêt ne faillit pas, chaque chapitre montre qu'il est important pour la suite, et l'on comprend rapidement que l'on ne va pas se perdre dans le passé des protagonistes. Il y est décrit juste ce qu'il faut. Et cela me convient très bien. Rodolphe va à l'essentiel, avec 2 hommes au caractère bien travaillé, et d'autres personnages qui s'ajoutent au fil de l'intrigue et qui apportent de l'eau au moulin.

Sous fond d'un pseudo copainsdavant.com, une personne tue des anciens camarades de lycée. L'auteur a très bien su garder le mystère jusqu'au bout et j'avais pensé à une autre personne que le meurtrier annoncé. Je n'ai trouvé aucune incohérence (et quand un livre est court, je fais très attention à ça ; quand un livre est gros, l'auteur peut plus facilement noyer le poisson). C'est un livre qui, dans son ensemble, m'a beaucoup plu. Bonne longueur, j'étais totalement happée.

Dernière petite chose : le titre est sacrément bien trouvé et rien que pour ce choix j'avais envie de savoir ce qu'il y avait derrière cette fameuse "Nostalgie" !


jeudi 20 août 2015

Journal d'Hirondelle d'Amélie Nothomb

91 pages
21 mai 2008
Le Livre de Poche


"C'est une histoire d'amour dont les épisodes ont été mélangés par un fou."

Personnage nothombien par excellence, le héros, solitaire, misanthrope, détaché de toute réalité contingente, coincé dans sa propre logique, amputé des perceptions ordinaires, agissant au-delà du bien et du mal, découvre justement qu'il y a un au-delà et qu'il se nomme amour. 


Enfin j'ai lu un livre de mademoiselle Nothomb qui m'a captivée de la première à la dernière ligne ! Ces dernières années, j'appréciais plus ou moins ce que je lisais d'elle, mais j'étais passée à côté de Journal d'Hirondelle. Quelle histoire ! Elle est simple mais analysée dans les tréfonds de l'humain inhumain nommé Urbain.

Le narrateur est en proie à un ennui qui le ronge jusqu'à l'os. Il n'éprouve plus aucun sentiment, quel qu'il soit. Il rencontre un russe lui proposant de devenir tireur à gages. Découvrir cette adrénaline lui vaudra un plaisir au-delà de tout soupçon, jusqu'à sa rencontre avec celle qu'il nommera Hirondelle.

Amélie Nothomb réussit une très belle analyse de l'humain confronté à l'envie d'explorer et de comprendre ses pulsions, ses contradictions. Elle utilise sa plus belle plume pour nous envahir de cet homme qui se fait appeler Urbain. Je trouve que Journal d'Hirondelle est digne de tous ses livres "à part". Il y a juste ce qu'il faut pour être captivé. Aucune longueur. Bien entendu, faisant moins de 100 pages, il est clair que l'on va à l'essentiel. Mais elle réussit à créer une histoire vraiment prenante avec cet homme quelque part pitoyable. Et pourtant, on espère qu'elle lui offrira une fin heureuse, et qu'elle donnera réponse aux questions que l'on se pose avec Urbain.

Style impeccable, narration piquante et fort bien ciselée, c'est un excellent Nothomb !!!

mercredi 19 août 2015

Popcorn Melody d'Emilie de Turckheim

200 pages
20 août 2015
Héloïse d'Ormesson


" Dans la vie, un certain niveau de manque est une bénédiction. " Tom Elliott, la trentaine, est propriétaire de la dernière supérette de Shellawick, un bled paumé du Midwest, frappé par l'alcoolisme et le chômage, situé au milieu d'un désert de cailloux noirs infesté de mouches. 50% des habitants de Shellawick se tuent à la tâche dans l'usine de popcorn du groupe Buffalos Rocks, magnat industriel qui domine toute la région. Depuis des années, la bourgade se meurt et les commerces de Shellawick ferment les uns après les autres. Mais le coup fatal est porté par l'ouverture d'un immense supermarché ultramoderne juste en face du commerce de Tom. La descente aux enfers commence... Derrière les personnages burlesques, l'improbable décor et ses deux magasins, symboles de deux rapports totalement opposés à la consommation, à la vie, au besoin et à la satiété Popcorn Melody jette un regard comique sur notre société capitaliste et pointe du doigt l'anéantissement de la culture et des populations amérindiennes. Avec son univers déjanté et sa plume ô combien ciselée, Émilie de Turckheim donne un coup de pied bien placé dans notre confortable fourmilière.


Cette histoire a un ton, un degré de dérision. C'est assez cocasse, et c'est ce qui fait son charme. Notre narrateur, Tom, est assez particulier. Il refuse de mettre la clé sous la porte de son supermarché alors qu'il ne cherche pas à rivaliser avec le nouveau magasin qui fait fureur en face de chez lui. Non seulement il ne le cherche pas, mais en plus il choisit précisément ce qu'il veut comme produits à vendre dans ses rayons. Autrement dit, presque rien ! Les habitués du commerce de Tom ont d'autant plus envie de déserter et arrêter de râler qu'ils n'hésitent pas à laisser tomber leur ami sans aucun scrupule à l'ouverture de ce magnifique endroit ou tout le monde trouvera son bonheur. Tom nous raconte ses souvenirs autour de cet achèvement, les histoires avec sa famille, ses connaissances, et c'est avec grand plaisir que j'ai découvert toutes ces petites anecdotes dotées d'un humour parfois simplement drôle, parfois noir.

Tom est vraiment un homme à part. Je l'aurais peut-être détesté dans la vie. Là on ne sait trop quoi penser de lui... En tout cas, Emilie de Turckheim a réussi un joli tableau avec la vie burlesque des habitants de Shellawick ! C'est un humour décalé et j'ai pris beaucoup de plaisir à lire ce roman. 

mercredi 12 août 2015

Sansonnets, un cygne à l'envers de Pierre Thiry

126 pages
25 février 2015
Books on Demand


Ces cent sonnets ont été écrits un peu n'importe quand, lorsque j'avais du temps : à l'arrêt d'autobus, sur le quai de la gare SNCF, dans un train, sur une terrasse de café, dans une salle d'attente, sur un coin de table durant un repas ennuyeux, dans ma cuisine, dans mon bureau, dans un magasin de chaussures, en attendant mon tour à La Poste, en discutant avec ma coiffeuse, en attendant un dessert au restaurant, en marchant en forêt, en essayant une nouvelle chemise, en lisant un livre, en marchant sous la pluie, en savourant un concert, en rêvant au sourire chaleureux de la meilleure des amies, en écoutant converser les sansonnets au-dessus de l'étang des cygnes...


Quelle belle surprise que ces sonnets ! Quel livre plein de fraîcheur, de dérision, de réalisme, d'optimisme ! Ce qui est intéressant, c'est que lorsqu'on a du mal à se concentrer sur un roman car on a des tas de choses à faire, on peut se pencher sur quelques sonnets puis retourner à ses occupations. Ce n'est peut-être pas purement poétique (là je ne saurai pas juger, je ne m'y connais pas assez), mais toutes ces lignes sont bourrées de qualités. Il y a énormément de recherche, et c'est un exercice que je ne pourrais jamais accomplir moi-même. On y retrouve différentes figures de style, là est le génie de l'auteur. Il s'est adonné à un exercice de réflexion et de contemplation tout en maniant les mots dans sa tête puis en les couchant sur le papier. 

J'admire vraiment Pierre Thiry, tout ce qu'il écrit est assez authentique et il y a toujours un vrai travail autour du thème de l'œuvre. Même si vous n'êtes pas adeptes de la poésie, ce petit livre ne vous fera que du bien !

Et qui dit Pierre Thiry, dit :
- Isidore Tiperanole et les trois lapins de Montceau-les-Mines (chronique à venir, lecture pour bientôt !)

Ainsi que le site de l'auteur :


 Merci beaucoup à Pierre Thiry de m'avoir permis de lire ce livre si particulier. Je le relirai souvent, quelques pages par-ci, quelques pages par-là, avec un grand plaisir.


samedi 18 juillet 2015

Ces douleurs que l'on cache - premiers chapitres


1



Comme tous les jours depuis cinq ans, Luce s’en alla de son travail vers 18h. Elle se sentait bien, heureuse, comblée. Le vide qu’elle avait ressenti durant toutes ces années était enfin parti. Elle avait cueilli le bonheur au passage, et, cette fois-ci, il était resté à ses côtés. Le bonheur, c’était Xavier. Cela faisait un petit moment qu’ils se connaissaient, mais elle était trop déprimée pour s’imaginer quoi que ce soit entre eux. Les âmes se rencontrent quand les personnes se confient, se vident de tous les tracas qui les perturbent. Les âmes se côtoient, les âmes s’apprécient, et si Cupidon a bien fait les choses, les âmes se découvrent sœurs et finissent par s’unir. C’est ce qu’il s’était passé pour Luce et Xavier. Leur symbiose les étonnait jour après jour. Ils étaient faits pour être ensemble. Luce, qui ne croyait pas à toutes ces histoires, avait bien fini par admettre que tout cela était étrange, cette rencontre (pourquoi à ce moment-là, pourquoi lui et pas un autre), cette envie de se confier alors qu’elle avait toujours eu du mal à le faire, cette attirance qu’elle avait pour lui alors qu’il était l’opposé du physique masculin qu’elle aimait habituellement. C’est avec cet homme qu’elle se voyait vieillir. Pour la première fois, elle avait réussi à voir très loin dans son avenir. Pour la première fois, elle mesurait le bonheur de vivre. Ce bonheur qu’avaient découvert ses amies bien avant elle. Et comme souvent, on croit les gens heureux, mais parfois certains cachent des douleurs qu’ils ne peuvent soulager.
Luce et Xavier avaient un caractère et une personnalité étonnamment similaires, le trait les caractérisant le plus étant de faire passer autrui avant eux-mêmes. Rendre les gens heureux était leur but. Cela se caractérisait sous différentes formes, suivant les personnes : un appel, un bouquet de fleurs, un lit temporaire chez eux… Ils essayaient de penser aux autres, d’être serviables au possible. « La vie est dure, être aimable l’adoucit » était une phrase que Luce s’était inventée et qu’elle se répétait souvent.
Elle prit son téléphone et composa le numéro de portable de Xavier. Comme tous les soirs, elle lui laissa un message pour le prévenir de son départ de la société. Ce n’était pas du flicage, juste une simple et belle attention qu’elle lui témoignait. Xavier n’avait pas de travail en ce moment, cela allait faire trois mois qu’il était au chômage. Le soir, quand elle rentrait, il faisait en sorte qu’ils puissent manger immédiatement pour avoir le reste de la soirée disponible et vaquer à leurs occupations. La journée leur paraissait plus longue de ce fait.
Elle arriverait donc de bonne humeur, d’abord pour remonter le moral de Xavier, mais aussi parce qu’elle avait pour habitude de vouloir transmettre sa joie de vivre. C’était bien connu, quand on croise une personne qui nous sourit, cela devient généralement contagieux.
Elle monta dans sa voiture, la fit démarrer, alluma la musique, ouvrit légèrement sa fenêtre et la voilà partie pour une demi-heure de trajet, ce qui est peu quand on travaille en région parisienne.
Sur l’air de Sing For Absolution, Luce se mit à fredonner le refrain. Il y avait des morceaux qui donnaient la pêche, d’autres, comme celui-là, qui rendaient un peu nostalgique. Luce se mit à ressasser quelques souvenirs qui lui firent monter une émotion qui se faisait rare ces derniers temps. Sa vue se brouilla, malgré ses efforts pour penser positif à nouveau. Quand certains moments refont surface, d’autres viennent s’insérer pour semer le trouble en nous, la confusion dans notre mémoire. Luce décida de refouler ces instants en secouant la tête. Elle changea de piste sur le CD pour en mettre une plus rythmée et monta le son. Malgré tout, une chose ne quittait pas son esprit. De rage, elle appuya d’un coup sec sur l’accélérateur. Elle se trouvait à ce moment-là en plein centre-ville. Elle pila juste à temps devant un feu rouge, brouillé par des larmes qui avaient commencé à couler quelques secondes auparavant. Elle respira un bon coup, se disant que la maman et son enfant sur le trottoir à sa droite auraient pu traverser à ce moment, et que si sa voiture n’avait pas eu de bons freins, elle n’aurait pas pu les éviter… Positiver, toujours voir le meilleur dans chaque situation, aussi malheureuse qu’elle puisse être. Elle réussit donc, par le biais de cette maman, à reprendre le dessus sur son coup de déprime.
Une fois le feu vert, elle repassa la première, monta rapidement en vitesse, pour stabiliser la voiture à 50 km/h. Elle avait l’habitude de respecter les limitations. Son code, elle le connaissait sur le bout des doigts, même au bout de dix ans de permis.
Puis, tout arriva très vite dans sa tête : le rétroviseur, le camion, le bébé, la route, le passage-piéton, la maman. Elle n’eut pas le temps de tout mettre en ordre. Elle eut l’instinct de piler, tout en fixant le regard de la mère. C’était le moment où jamais. C’était devenu une évidence.




2



Les pompiers furent sur les lieux très rapidement, leur caserne étant à 300 mètres de l’accident. Ils débloquèrent la porte du conducteur, retirèrent délicatement la tête du volant, coupèrent la ceinture de sécurité, la dégagèrent tout en douceur. Les jambes étaient coincées par la compression du siège vers le volant, due au choc du camion.

Xavier arriva en trombe à l’hôpital. Il avait encore du mal à comprendre ce qu’il faisait là. C’était une chose à laquelle il n’avait encore jamais songé. Il avait trouvé le bonheur, avait enfin compris ce que c’était, il n’avait donc pas réalisé qu’un bonheur pouvait être très injustement enlevé. De nos jours, beaucoup de couples se séparent, et de ce fait, on pense perdre son âme sœur de cette façon-là plus que de la manière la plus dure qu’il soit : la mort. La mort qui, lorsqu’on est jeune, ne prévient pas. Elle vous prendra au bout de la rue, que ce soit un bus, une voiture, une moto. Elle peut vous prendre lorsque vous êtes à pied, en voiture, chauffeur ou passager. La mort est finalement une bonne rivale à la séparation, l’adultère, toutes ces choses qui tuent un couple à petit feu. Il est vrai que ce sont de longues agonies, la mort étant elle-même plus directe. Dans le cas de Luce, cela risquait d’être démontré différemment. La mort peut savoir être immonde… Mourir d’agonie jeune… Mourir lentement... Se sentir doucement partir et ne pouvoir rien y faire… À part attendre qu’elle nous prenne définitivement. Voir les gens que l’on aime implorer Dieu de faire un geste, d’abréger les souffrances ou d’éloigner la mort, de ne pas nous prendre si tôt.
Luce était toujours en vie, pour le moment. Xavier n’en pouvait plus d’attendre. Mais l’attente n’est pas forcément mauvais signe. Que l’opération dure 1 heure ou 5 heures, cela lui laisserait toujours une parcelle d’espoir jusqu’au moment où le chirurgien allait pointer son nez dans la salle d’attente. Moment fatidique. Moment de supplice. Scruter le regard de l’homme en face de soi. Il ne sourcillait pas. Le pauvre, il devait en voir tellement chaque jour. C’était son métier après tout… Xavier vit cet homme tant attendu entrer dans la salle et s’approcher de lui. Les mots résonnèrent dans sa tête. Il n’arrivait pas à comprendre ce qui venait de lui être dit. « Bon Dieu, mais que m’arrive-t-il ? » fut la dernière phrase qu’il put formuler. Il s’effondra par terre, tout autour de lui s’enfonça en même temps que sa descente.
Le chirurgien le releva, l’assit sur un siège, demanda de l’eau à une infirmière qui passait par là. Il lui tendit le gobelet, s’assit à côté de lui, le prit par l’épaule. Il essaya de le calmer pour pouvoir enfin répéter ce qu’il venait de dire.
― Monsieur, ne vous emballez pas, tout s’est bien passé. Vous m’entendez ? Calmez-vous. Votre amie Luce est en salle de réveil. Vous allez bientôt pouvoir la rejoindre.
Xavier leva la tête vers l’homme, il ne croyait pas ce qu’il venait d’entendre.
― C’est vrai ? Elle est sauvée ? Sauvée ? Malgré l’état dans lequel elle était, vous l’avez sauvée ? s’exclama-t-il en pleurant.
― Doucement, Monsieur. Elle est tirée d’affaire, oui, elle est toujours parmi les vivants, mais nous sommes obligés de la mettre sous respiration artificielle pour le moment. Elle comprend ce que nous disons, mais elle n’a pas vraiment de réaction. Vous pouvez la veiller, mais évitez de trop lui parler. Elle va avoir besoin de beaucoup de repos. Votre présence à ses côtés lui sera néanmoins très bénéfique. Montrez-lui à quel point vous l’aimez, cela lui donnera la force de poursuivre dans la voie de la guérison. La volonté nous permet d’accomplir tellement de choses…




3



Xavier avait envie de pleurer, encore et encore. Sa Luce d’amour était allongée devant lui, sans réaction. On aurait dit un corps sans vie, si ce n’était qu’un respirateur le tenait au fil de l’espoir. Elle avait le visage bandé, à cause de diverses commotions qu’il avait subies. La ceinture de sécurité avait retenu le corps, sans cela il aurait été projeté à travers le pare-brise. Mais le choc fut tellement violent que la ceinture ne l’avait pas bloqué suffisamment ou assez rapidement. Le corps avait commencé une sorte d’éjection du siège, la tête avait tapé dans le pare-brise avec une force impressionnante, puis était retombée brutalement sur le volant. Les différents impacts sur le visage et des éléments de la voiture ont pu démontrer l’intensité du choc. Ce qui est encore plus dur, c’est que des passants, jeunes ou moins jeunes, ont été témoins de cet accident. Il est difficile de faire partir de telles images de sa mémoire, peu importe notre âge et notre vécu. Les douleurs de la vie nous façonnent, oui, mais de telles images qui nous reviennent sans cesse, c’est invivable…
Le camionneur, quant à lui, n’avait rien eu. L’avant du camion avait été un peu abîmé, mais rien d’alarmant. Il avait cependant eu très peur pour la dame devant lui. Pauvre dame…

Xavier remercia le ciel, ou ce qu’il pouvait y avoir comme ange gardien, pour avoir su garder en vie la femme de ses rêves. Ce qu’il craignait aujourd’hui, c’était le prix à payer… Des séquelles physiques, mentales, pour elle comme pour lui, si elle allait s’en sortir, si elle allait succomber. Espérer en vain ou non…




4



Je le sais, je le sens. Je suis sur Terre pour sauver des vies. Les gens ne le savent pas, mais je suis là pour eux. Ce matin, je me suis levée le cœur léger. On m’avait donné une mission. À moi. MOI. Enfin, ce jour-là était arrivé. Je suis vouée à vous, chers amis. Mon état n’aura aucune importance.
Ce matin donc, je me suis sentie légère au lever. Et pour cause : je flottais dans les airs. Mon cœur devait être si heureux que mes pieds ne touchaient plus terre. Mon subconscient connaissait le programme de la journée. J’allais sauver quelqu’un et en soulager mes douleurs.
Existe-t-il un dieu ? Ou une présence gardienne de notre vie, de notre avenir, une présence capable de nous diriger dans notre quotidien ? Toujours est-il que je sens cette présence chaque jour, principalement aux moments de détresse, mais tous les matins au lever je sens qu’elle est là, et qu’elle me suivra jusqu’à ma nuit.
Aujourd’hui j’ai sauvé quelqu’un et je remercie cette force divine de m’avoir permis d’accomplir ce que je craignais, de m’avoir donné la force de le faire sans réfléchir. Ma réflexion étant mon ange gardien lui-même.



5



Xavier accompagna Luce dans sa chambre, et s’installa à son chevet. Il n’arrivait pas à se projeter dans l’avenir. Pas tant qu’elle ne serait pas réveillée et réellement hors de danger. Il avait éteint son portable, il ne se sentait pas en mesure d’appeler leurs proches dans l’immédiat. « C’est cruel, pensait-il, mais c’est plus fort que moi. » Il contemplait sa beauté, sa beauté dévastée par un camion, son amour sous l’emprise de calmants, son futur tellement proche devenir incertain.
« Les choses tiennent à un fil. Comment s’imaginer ce qu’il peut se passer durant une journée ? On dit qu’il faut toujours profiter de l’instant présent, faire comme si l’on risquait de ne plus être de ce monde demain. Mais comment pouvons-nous être toujours de bonne humeur, enjoués de ce qu’il peut nous arriver durant cette journée ? Il est tellement dur de prendre des défaites du bon côté, de dures épreuves comme des leçons que la vie nous donne. J’ai embrassé Luce ce matin, lui ai dit de passer une bonne journée. Mais si je ne l’avais pas fait, si je m’étais fâché avec elle pour une raison quelconque, ou si je ne m’étais pas réveillé quand elle partait, me serais-je reproché de ne pas l’avoir fait sourire le restant de mes jours ? Comment pouvons-nous être tout le temps heureux, positifs, ne voir que le bon côté de la vie ? » Xavier se sentit partir dans de lugubres pensées, il se rendit compte qu’il n’arrivait pas à réfléchir comme il le souhaitait. Il voulait parler d’une chose, mais cela aboutissait sur un autre sujet. La fatigue, la fatigue, il allait falloir y remédier. Peut-être partir se reposer un peu, prévenir la famille de Luce, lui ramener des affaires. Cela lui raviverait l’esprit : sentir son parfum préféré, peut-être aussi celui de Xavier, entendre de la musique familière. Xavier pensa lui ramener un livre dont il pourrait lui lire quelques pages chaque jour. « Je trouverai des choses à faire en ta compagnie, ma douce. Je ne suis pas près de te lâcher. Je t’aime… »
Et il se laissa aller. Après avoir longtemps retenu le stress et l’angoisse qui l’avaient envahi, il se mit à pleurer en silence. Il aurait aimé être loin d’elle à ce moment-là, pour qu’elle ne ressente pas ses peurs, mais peut-être qu’au final, elle aurait envie d’ouvrir les yeux pour lui montrer qu’elle allait se remettre vite, par amour pour lui. Avec des si, on pourrait refaire le monde…